ce qu'il reste de moi

j’ai peur qu’un jour je n’aie plus rien à dire,
que les mots me manquent, que les souvenirs s’effacent
que les morceaux qu’il reste de moi flottent, et puis s’échappent
j’ai peur que le soleil chute, que les étoiles se heurtent
que ma mémoire se joue de moi 

avant que je n’aie pu vous raconter 

ce jour où je suis née et où j’ai cessé d’exister
mais surtout vous parler de celui
où je me suis reconstruite avec des résidus, 

avec un reste à peine de vie.

je ne sais pas quoi me dire

Je ne sais pas quoi me dire.

Que dit-on à quelqu’un

qui a tout perdu ?

Qu’y a-t-il de si effrayant

dans le fait que simplement être

soit ce qu’il me reste à faire

à présent ?

un prix à payer

Et moi qui hurle après la vie depuis toujours — pourtant, quand elle se présente à moi dans sa forme la plus pure, je la rejette.

Je ne connais rien de ce silence, de cet état placide — personne ne m’a jamais dit que parfois, la vie ressemble aussi à ça : elle peut simplement se glisser sans qu’on puisse même la sentir passer. Sans accroche, sans dommages, aussi douce que le flot d’un ruisseau, aussi légère et invisible que le vent.

Mais quand elle n’est pas brutale, je ne sais plus qui elle est, je ne la reconnais plus, et je me demande vers quelle tempête elle m’emmène.

Je ne peux pas croire que ce répit ne me coûtera rien, et à la fois, je suis si fatiguée de croire que l’existence est un prix à payer.